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Art médiéval au cœur du Quartier latin
Entre Notre-Dame et la Sorbonne, dans une petite rue donnant sur le boulevard Saint-Germain, se trouve une longue bâtisse médiévale datant du 13ème siècle, qui a conservé son ossature d’origine, ses vieilles pierres et sa splendide toiture de tuiles plates, percée par des lucarnes pointues. Cet édifice gothique, classé Monument historique en 1887, n’est autre que le Collège des Bernardins, un ancien collège cistercien de l’Université de Paris.
La toiture du bâtiment a été restituée dans ses dimensions médiévales par une charpente métallique et près de 110 000 tuiles plates artisanales de six nuances différentes. © Cabinet d’architecte de Jean-Michel Wilmotte
A sa construction en 1248, l’Europe se trouvait plongée dans une véritable révolution intellectuelle : les universités remplacent peu à peu les monastères dans leurs fonctions pédagogiques et culturelles. Paris, seule capitale européenne à bénéficier en son sein d’une université, connaît alors un rayonnement qui n’a nul pareil sur le continent. C’est pourquoi, les moines cisterciens du monde entier sont encouragés à y faire leurs études. Pour ne pas détourner ces moines de leur retraite spirituelle, on fait construire, un demi-siècle après la fondation de l’Université de Paris, un collège, qui leur est dédié, sur le modèle architectural des abbayes cisterciennes.
La salle des moines baignée de lumière. © Sarah Pons / Paris ZigZag
Mais, il faut savoir que l’histoire du collège, qui figure aujourd’hui comme l’un des plus grands édifices médiévaux de Paris, a été plus que mouvementée : après quatre siècles d’occupation monastique, l’édifice est remis entre les mains des pouvoirs publics, à la Révolution française, et prend toute sorte de nouvelles fonctions au fil des années. Le collège est, pendant une courte période, reconverti en prison pour les bagnards, est ensuite utilisé par la Ville comme grenier à sel, il sert à nouveau, brièvement, d’école chrétienne, avant d’être occupé pendant près d’un demi-siècle par les pompiers qui y installe leur caserne. Ce n’est qu’en septembre 2008 que ce lieu, racheté par le Diocèse de Paris, ouvre pour la première fois au public parisien, après plus de quatre années de rénovation.
L’enfilade de colonnes gothiques de la Grande nef, jointes par des arcs brisés. © Sarah Pons / Paris ZigZag
Passée la porte de ce joyau de l’architecture cistercienne, on découvre aussitôt la grande nef longue de 70 mètres et ses 32 colonnes monolithiques jointes par des arcs croisés. L’architecture de la salle a été volontairement pensé de manière à être la plus sobre possible afin de ne pas déconcentrer les moines. La nef faisait office de lieu de vie pour les centaines d’étudiants qui affluaient du monde entier pour venir y étudier. On y trouvait des salles de cours, un réfectoire, une salle capitulaire, des cuisines… une sorte d’open space médiéval – concept particulièrement novateur pour l’époque ! Toute l’esthétique du lieu repose donc sur ses lignes harmonieuses et parfaitement symétriques, naturellement baignées de lumière, offrant une magnifique perspective.
Le cellier médiéval, revêtu au sol de béton ciré évoquant la terre battue de l’époque. © Cabinet d’architecte de Jean-Michel Wilmotte
Durant la visite, on accède au sous-sol du bâtiment où se trouvait l’ancien cellier médiéval, autrefois comblé de terre à hauteur des chapiteaux afin d’éviter son enfoncement dans le sol. Le déblaiement du cellier laisse aujourd’hui apparaître les anciennes voûtes romanes légèrement de travers en raison de l’affaissement des piliers qui ont désormais été renforcés. On trouve également à plusieurs endroits, notamment sous les combles médiévaux ou au bout de la grande nef, de splendides rosaces en grisaille, restituées ou bien reconstituées pour être le plus fidèle à leur aspect d’origine.
Le Grand Auditorium, aménagé dans le grand comble médiéval, et sa grande baie centrale en anse de panier. © Cabinet d’architecte de Jean-Michel Wilmotte
En faisant un tour du côté de l’ancienne sacristie gothique datant du 14ème siècle, majestueuse avec ses 11 mètres sous plafond, on apprend qu’elle devait autrefois permettre de relier le bâtiment des moines à l’imposante église des Bernardins, qui n’a malheureusement jamais été achevée et dont les derniers restants furent démolis lors du percement du boulevard Saint-Germain. A l’extérieur de l’édifice, on peut apercevoir l’unique vestige de cette église, un pan de son mur sud, recouvert d’un filet pour protéger des éventuelles chutes de pierre. Néanmoins, certains éléments du collège ont complètement disparus, comme par exemple, l’ancien jardin médiéval.
L’ancienne sacristie et ses hautes colonnettes gothiques, davantage travaillées, mais toujours marquées par la sobriété cistercienne. © Sarah Pons / Paris ZigZag
Les substructions de l’ancienne église toujours visibles. © Sarah Pons / Paris ZigZag
Et si quelques vestiges ont pu être préservés, le collège a, par ailleurs, été entièrement réaménagé et modernisé pour le réhabiliter en lieu de réflexion, d’apprentissage et de culture : salles de cours, de réunion et de conférences, bibliothèque et espaces d’exposition… autant d’espaces qui permettent à ce centre intellectuel, culturel et spirituel de proposer un large éventail d’activités aux quelques 150000 visiteurs annuels. Régulièrement, sont organisés des tables rondes, des séminaires de recherche, des formations, des expositions d’art contemporain ainsi que des spectacles, autour de thématiques transverses : théologie, philosophie, économie, politique, sciences, art, etc.
Escalier autoportant à voûte sarrasine, datant du 18ème (auparavant, on pouvait monter et descendre sans se croiser), abritant une mystérieuse statue acéphale sans tête retrouvée en-dessous lors de fouilles. © Sarah Pons / Paris ZigZag
Pour l’anecdote, sachez que l’on peut remercier de tout cœur les pompiers d’avoir, pendant près de 50 ans, occupé et entretenu les lieux. Car sans leur présence, on ne sait pas ce que serait devenu le Collège des Bernardins dont la structure était déjà particulièrement instable avant sa rénovation en 2004. Ce superbe héritage du Moyen-Age ne serait probablement, à ce jour, plus qu’un tas de ruines !
Salle des prières réaménagée avec le mobilier personnel du Diocèse de Paris. © Sarah Pons / Paris ZigZag
Pour plus d’infos sur l’histoire et la programmation du Collège des Bernardins, rendez-vous sur leur site Internet : https://www.collegedesbernardins.fr/
Collège des Bernardins - 20, rue de Poissy, 75005
Cardinal Lemoine (ligne 10)
Ouvert du lundi au samedi de 10h à 18h et le dimanche de 14h à 18h
01.53.10.74.44
Visite guidée payante tous les jours à 16h (accès gratuit à la nef et à la sacristie)
Article paru dans paris zigzag
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