• Une exposition retrace l'histoire de l'immigration italienne en France 

     

    Le Palais de la Porte dorée a la bonne idée de nous le rappeler : l'immigration italienne, massive jusqu'en 1960, ne fut pas une histoire si simple.

     

     

    Ironie de l'histoire 

    C'est au moment où le royaume d'Italie est proclamé, en 1861, que sa population amorce une des émigrations les plus massives qui ait jamais existé. « Comme s'il fallait savoir d'où l'on part pour en partir », remarque Dominique Païni, un des trois commissaires de la dernière exposition du Palais de la Porte Dorée qui retrace cent ans d'immigration italienne en France. Avant 1914, pas moins de 14 millions d'Italiens avaient déjà quitté la péninsule en direction de trois pays principaux : les Etats-Unis, l'Argentine et la France. Mais tandis que le départ vers le Nouveau Monde, souvent sans retour, donne lieu à toute une mythologie, l'immigration italienne en France, qui reste à ce jour la plus importante, apparaît vite comme une histoire d'assimilation facile, ce qui n'est qu'un infime aspect des choses.

     

    La pauvreté, terreau d'une riche culture  

    C'est ce que nous révèle cette exposition à la fois tonique, pédagogique et foisonnante. Quatre cents documents, extraits de films et d'œuvres d'art sont rassemblés autour de trois axes principaux : les lieux, le travail et les empreintes culturelles. On y apprend que les Italiens arrivés en France au XIXe siècle venaient surtout du nord de la péninsule, et du sud au XXe siècle ; qu'ils s'installèrent dans la capitale, mais aussi dans le Sud-Est (comme l'attestent les citations de Marseille, porte du Sud, écrit par Albert Londres en 1927), la région Rhône-Alpes et l'Est. Un grand tableau peint en 1896 par Angelo Tomasi, Gli Emigranti, exposé pour la première fois en France, illustre bien cette permanence de l'émigration dans l'imaginaire italien : on y voit des dizaines de familles aux vêtements régionaux divers attendant dans un grand port. Une toile aussi emblématique pour les Italiens que La Liberté, de Delacroix, pour les Français. Plus loin, on est intrigué par une statue de Rodin, réalisée d'après un de ses deux modèles italiens (il se tenait à l'époque un « marché aux modèles » place Pigalle où les Italiennes étaient nombreuses).

     

    Une exposition retrace l'histoire de l'immigration italienne en France

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    Des extraits du film Toni, de Jean Renoir (1935), rappellent qu'il fut le premier à raconter l'histoire d'un immigré en France, et ceux de Thérèse Raquin (son amant, dans le roman de Zola, est italien) illustrent la naissance des stéréotypes : l'étranger est inquiétant, mais aussi objet de désir. Autres belles surprises, parmi tant d'autres : le parcours étonnant de l'affichiste Leonetto Cappiello (1875-1942) ou celui de Cino Del Duca (1899-1967), qui, avec Nous deux, implanta en France la culture du roman-photo... En 1960, le boom économique en Italie stoppe cette immigration massive. C'est aussi l'année où La Dolce Vita emporte la Palme d'or à Cannes. Nouvelle ère, nouvel imaginaire, nouveaux stéréotypes. 

     

    5 dates clés

    1861 Risorgimento : l'Italie est unifiée.

    1881 Les Vêpres marseillaises, premier événement de violence xénophobe contre les Italiens, font 3 morts et 21 blessés

    1893 Affrontements dans les salines d'Aigues-Mortes : 8 morts et plus de 50 blessés

    1914 2 millions d'Italiens sont arrivés en France depuis 1860. 

    1947 Accord de main-d'oeuvre franco-italien, dernière phase du flux migratoire.

     

    Exposition Ciao Italia !

    Palais de la Porte Dorée

    Adresse : 293, avenue Daumesnil, 75012 Paris

    Transports en commun

    En métro : station Porte Dorée (ligne 8), En bus : 46, En tramway : ligne T3

    Exposition : Un siècle d'immigration et de cultures italiennes en France (1860-1960), du 28 mars au 10 septembre 2017

     Article paru dans Télérama


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